Les Squats en amplitude complète sont-ils réellement mauvais pour nos genoux ?

J’ai longuement hésité avant d’écrire cet article car énormément de personnes ont déjà couvert le sujet. Mais je l’ai quand-même fait car aucun d’eux n’a réuni autant de bonnes raisons dans le même écrit. Faisant face à ce genre de situation depuis de longs mois, je ne vais pas mâcher mes mots afin de faire passer le message le plus directement possible. Ne sois donc pas étonné par ce style véhément et désapprobateur !

Rarement un mouvement aura autant divisé la communauté sportive : certains recommandent de ne pas descendre sous la parallèle tandis que d’autres ne jurent que par cela ! Les uns contredisent la technique des autres tandis que ces derniers s’attaquent directement aux pratiquants du mouvement… Qui a raison ? Qui a tort ? Nous allons tenter de le découvrir dans les lignes qui vont suivre !

Avant même de commencer à essayer de trouver une réponse, tâchons de comprendre ce qu’est un squat complet ! Le mot squat (dans la langue de Shakespeare) peut être traduit par ‘’s’accroupir’’ tandis que dans la langue de Molière, c’est le mot flexion (à la barre) qui sera utilisé. Selon moi, nous retrouvons déjà ici un problème : le mot anglais est beaucoup plus précis sur la tâche à réaliser que son homonyme français ! L’action de s’accroupir entend que l’on descende les fesses le plus bas possible afin de rester dans une position plus ou moins confortable et stable : on passe donc inévitablement sous la parallèle. Le mot ‘’flexion’’ quant à lui ne sous-entend pas du tout de combien de degrés devraient-être cette flexion ni où elle devrait se dérouler…

Je m’explique ! Le corps humain est composé d’un nombre important d’articulations pouvant se fléchir (action de flexion) et s’étendre (action d’extension) grâce à l’action de muscles aux actions opposées (agonistes et antagonistes). La flexion peut se passer au niveau du coude tout comme au genou. Il y a donc déjà une notion d’imprécision qui est lié au mot. Si nous décidons de ne pas jouer les idiots effrontément à la recherche de conflits, gageons que la flexion concerne le membre inférieur (la jambe donc) ! Ce membre comprend 3 articulations : la hanche, le genou et la cheville. Où la flexion a-t-elle lieu ? Le genou ? La cheville ? Le genou ET la cheville ? Ou encore les trois articulations ? Et quelle est l’amplitude de cette flexion ? Un genou peut se fléchir jusqu’à 130-140°, une hanche jusqu’à 120° (si genou fléchi et 90° si ce dernier est tendu) et une cheville jusqu’à 30°. Le nombre de possibilités est important et cela peut être un problème !

Nous pouvons bien sûr passer outre ce problème. La flexion concerne les 3 articulations du membre inférieur ! Mais pourquoi choisir de ne pas utiliser toute la piste articulaire et musculaire de ces articulations afin de réaliser un exercice ayant pour but de renforcer lesdits muscles ? Alors si par ma connaissance de la biomécanique et de l’anatomie humaine je ne vois aucune raison valable (autres que celles liées à la pratique d’un sport particulier ou d’une situation pathologique) d’adopter cette réalisation partielle de l’exercice, certains avancent l’hypothèse, que dis-je, affirment haut et fort que c’est parce que les squats en amplitude complète (sous la parallèle en somme) sont mauvais pour les genoux !

Dans un premier temps, nous verrons pourquoi ces personnes pensent que c’est mauvais et déconstruiront ensuite les mythes derrières cette croyance absurde et non fondée. Nous verrons ensuite tout un nombre de raisons pour lesquelles le squat complet est important !

Construction et déconstruction d’un mythe

Dernièrement, j’ai assisté à une formation  en Haltérophilie et dynamophilie (Powerlifting) et un des intervenants, un professionnel de la santé de surcroît, lâche au beau milieu de sa présentation que les squats en amplitude complète sont mauvais pour les genoux. Alors si sur le coup personne n’a réagi, il n’aura pas fallu bien longtemps pour que nous posions des questions sur la légitimité de cette intervention… Le squat étant un mouvement fondamental pour les disciplines que sont l’haltérophilie et le Powerlifting. Malheureusement, cette croyance est ancrée au plus profond des universités francophones de notre plat pays : durant mes cours de sports à l’université, il ne fallait absolument pas casser la parallèle sous peine de voir nos genoux se désagréger sous le regard ébahi de l’assemblée. Mais s’il n’y avait que cela, passons encore ! Le problème c’est que cette croyance atteint également les simples sportifs s’entrainant dans des salles commerciales et low-cost et qu’ils s’octroient la liberté de me faire des remarques sur mon squat ‘’dangereux’’ pour les genoux. Ça c’est inadmissible ! Bien sûr ça ne l’est pas… Le plus dommageable a mes yeux c’est que de nombreux préparateurs physiques et entraîneurs font perdurer cette croyance auprès des jeunes sportifs qu’ils entraînent. Nous nous retrouvons donc avec plusieurs générations de sportifs, d’entraîneurs, de kinésithérapeutes et de médecins ayant développé une kinésiophobie : ils ont peur de bouger selon des amplitudes complètes (voir article sur la flexion lombaire : https://smartandstrong270241888.wordpress.com/2018/04/19/la-flexion-lombaire-et-le-travail-dos-rond-doivent-ils-etre-evites/ )…

Ce qui est fâcheux avec ce mode de pensée c’est qu’il est transmis oralement la plupart du temps ou par l’entraînement mais personne n’appuie son raisonnement avec des faits scientifiques concrets ou même avec des études… On leur a dit et donc c’est vrai ! J’appelle cela un dogme… Or en théorie de l’entraînement et donc en sciences, les dogmes vont à l’encontre du principe même de sciences : on parle alors de religion…

Mais d’où vient cette croyance que le squat est mauvais ? Comme pour beaucoup de problèmes que nous rencontrons aujourd’hui, les américains en sont la cause : c’est le Docteur Karl Klein qui en est à l’origine. Il voulait savoir pourquoi le nombre de blessures aux genoux étaient en augmentation auprès des joueurs universitaires de Football US. Il a donc recruté des haltérophiles et a relevé des mesures à l’aide d’instruments qu’il avait lui-même confectionnés. Il en est venu à la conclusion, en 1961, que les squats en amplitudes complètes étiraient les ligaments du genou et que c’était là la cause de ces blessures… L’année suivante, l’étude est publiée dans un numéro de Sports Illustrated et c’est tout ce qu’il aura fallu pour que le cancer se généralise… Les professeurs d’éducation physique, les médecins de l’agence médicale américaine et le corps des Marines éliminent tous le squat de leurs programmes et le déconseille à tout le monde. Le squat est alors relégué au rang de pestiféré des exercices de sports et seuls les athlètes de force athlétique, d’haltérophilie et certains bodybuilders continuent de l’utiliser. Cependant, les résultats qu’il a obtenus n’ont jamais pu être à nouveau obtenu[1]… On est donc loin de se trouver en présence d’une étude de qualité !

Mais réfléchissons un peu sur le fonctionnement de l’articulation du genou ! Le genou est une articulation au fonctionnement similaire à celle d’une charnière : elle ne peut bouger que dans un axe selon des mouvements de flexion et d’extension (le genou peut également opérer une rotation interne ou externe mais cela ne nous intéresse pas ici) ! Pour améliorer la stabilité et éviter que l’articulation ne dévie de sa course, nous retrouvons des ligaments, ménisques, bourses, capsules ainsi que des muscles (notamment le quadriceps et les ischio-jambiers pour ne citer qu’eux). Tout ces éléments assurent une contention qui maintien la patella (rotule), le fémur et le tibia ensemble. De plus, le poids du corps exerce une force de compression sur l’articulation qui va également aider à maintenir tout ces éléments en place, on parle de force de coaptation (à l’inverse, lorsqu’une traction sur une articulation est effectuée, on parle de force de décoaptation). L’articulation voit sa stabilité augmenter lorsque la contention et/ou la compression est améliorée. Cela paraît logique n’est-ce pas ? Lorsqu’on effectue un squat, la compression s’effectue en deux endroits : entre le fémur et le tibia (les ménisques vont alors absorber une partie de cette force) et entre le fémur et la patella. Plus le squat sera bas, plus la force de compression sera importante et la patella et le tibia seront compressés contre le fémur. De plus, les muscles et ligaments étant étirés, ils contribuent au maintien du genou.  La stabilité de l’articulation augmente ! Et comme la stabilité augmente, les forces de cisaillement diminue[2]. Le genou est sain et sauf ! En revanche, lorsque le squat n’est pas assez profond, la force de compression diminue au profit des forces de cisaillement. Seulement, certaines structures présentent à l’intérieur du genou (les ligaments croisés antérieur et postérieur) y sont particulièrement vulnérables et finissent par se rompre. Le squat partiel est un exercice prisé des préparateurs physiques en football, sport où le taux de blessures des ligaments croisés est particulièrement important. Les squats pratiqués à l’entraînement les affaiblissent et le match finit par les blesser. Mais pourquoi ? Car les 15 premiers degrés de flexion du genou sont les plus instables : la patella n’est pas compressée au fémur et la force de coaptation entre ce dernier et le tibia est plus faible. Les forces de cisaillements sont importantes et vu que l’exercice est effectué avec trop de charge la plupart du temps, que la technique n’est pas optimale et que le volume n’est pas adapté, ces facteurs conduisent à des blessures d’usure prématurées… Voilà pourquoi le squat partiel ne devrait jamais être utilisé par des débutants !

Quelques années plus tard, avec l’essor grandissant du bodybuilding et l’émergence de gymnases un peu partout en Amérique, il fallait trouver un successeur au squat et c’est chose faite : la machine de Leg Extension voit le jour ! L’idée est attrayante : avoir des cuisses énormes sans devoir squatter des poids énormes et en plus, cela va sauver vos genoux. C’est un carton plein ! De nos jours, dans n’importe quelle salle nous pouvons d’ailleurs trouver cette machine mais ce n’est pas dit qu’on y trouve un rack à squat… Pourtant cette machine n’a pas que des avantages notamment en ce qui concerne la santé des genoux ! Il se trouve que le squat est un exercice réalisé en chaîne fermée. C’est-à-dire que les segments osseux sus- et sous-jacent à l’articulation sont maintenus en place grâce à une force de compression (venant du sol et du poids de la barre plus celui des segments sus-jacents), or comme nous l’avons vu cette dernière n’est absolument pas dangereuse pour l’intégrité du genou ! Le Leg Extension quant à lui est un exercice réalisé en chaîne ouverte : il n’y a donc pas de compression des surfaces articulaires. Or quand les forces de compression diminuent, celles de cisaillement augmentent et nous savons que ce sont ces dernières qui sont dommageables… Un autre exemple d’exercice en chaîne fermée serait un mouvement de pompe : les articulations du poignet, coude et épaule sont compressés grâce à la force de réaction du sol ainsi que le poids des segments corporels situés au-dessus.

D’autres ont avancé l’argument que le squat complet pouvait être un facteur d’ostéo-arthrose mais aucune étude menée n’a pu trouver de lien de cause à effet… En revanche, ils peuvent avoir un effet préventif dans son traitement ! Utiliser toute la piste articulaire permettra une lubrification homogène du cartilage grâce à la synovie et évitera que l’articulation ne s’encroûte ! Cependant, le squat partiel pourrait être à l’origine de problèmes articulaires : l’amplitude réduite ne mobilise qu’une partie de la synovie de l’articulation et ne lubrifie donc que la partie utilisée. La personne devient donc performante sur une course articulaire réduite. Lorsque pour une raison X ou Y cette personne devra utiliser une amplitude maximale, l’articulation et les muscles n’y étant pas préparés pourraient être lésés. Il est donc absurde de réduire l’amplitude d’un mouvement sans raison particulière chez une personne saine.

Les idées avancées par le camp des squatteurs partiels ne tiennent pas la route du point de vue scientifique. Mais il y a bien une chose qu’il faut reconnaître : squatter est plus dangereux que d’utiliser une machine guidée ! Tout comme faire du VTT est plus dangereux que faire du Spinning mais c’est aussi plus marrant ! Squatter n’est pas plus dangereux que de prendre sa voiture pourtant un nombre non négligeable de sportifs pensent encore que c’est dangereux… Je dirais à ceux-là : restez chez vous car oui vivre, c’est parfois prendre des risques mais c’est ce qui donne sa saveur à l’existence !

À toutes ces raisons de ne pas écouter ces personnes qui déconseillent un mouvement, j’ajouterai celle-ci : ils condamnent ce qu’ils ne connaissent pas ! Si le squat était une personne, on ferait typiquement face à un cas de xénophobie. Ces personnes n’ont probablement jamais appris à squatter avec une technique correcte et alors oui, c’est un exercice dangereux. Tout comme il est dangereux de monter sur l’autoroute sans avoir appris à conduire au préalable. Le souci ne réside donc pas dans le mouvement lui-même mais dans l’incapacité à le réaliser correctement ! Or si quelqu’un est sensé vous entraîner et qu’il ne sait pas effectuer correctement ou corriger efficacement un des mouvements du programme d’entraînement, il est probable qu’il ne soit pas assez compétent pour s’occuper de vous. Autrement, il reconnaîtrait ses limites et ne vous prescrirait pas un mouvement qu’il ne connaît pas ou peu.

‘’Si l’exercice est la meilleure médecine, les squats lourds sont une vitamine essentielle !’’

Si les raisons de ne même pas considérer la thèse adverse sont nombreuses, les raisons de squatter le sont encore plus ! Parmi ces raisons nous reviendront sur quelques cas particuliers pour lesquels le squat en amplitude réduite peut-être une bonne idée. Autrement, nous nous concentrerons sur le squat tel qu’il devrait être réalisé : c’est-à-dire sous la parallèle !

Commençons avec quelques raisons pour lesquels le squat est un indicateur de bonne santé ! Certains diront que Dieu nous a fait à son image et d’autres que ce sont des millions d’années d’évolution qui on fait de nous ce que nous sommes aujourd’hui. L’important n’est pas de savoir qui a raison et qui a tort mais de voir que ces deux théories convergent dans le même sens en ce qui concerne le squat : nous avons deux chevilles, deux genoux et deux hanches avec des amplitudes de mouvements importantes qui nous permettent de réaliser un squat sans souci ! Nous n’avons qu’à observer les nourrissons : ils sont capables de rester de longs moments dans une position accroupie, tout comme nombres d’espèces de singes. La position accroupie est une position que l’on retrouve dans la nature ! Quand vous êtes dans les bois, si vous souhaitez faire vos besoins, vous allez devoir vous accroupir ! La gente féminine ne se pose même pas question quand il s’agit d’uriner et qu’aucune toilette n’est disponible. Les toilettes turques sont même prévues pour devoir s’accroupir (ce qui a d’ailleurs pour effet de mieux relâcher les muscles ano-coccygiens et donc de faciliter la défécation). La position de squat est donc 100% naturelle et s’il y a bien une chose que l’évolution fait bien, c’est d’éliminer tout ce qui n’est pas utile. Or, vu que nous l’utilisons, la nature a jugé bon de nous permettre de continuer à effectuer cette action ! On parle de pattern de mouvement fonctionnel (c’est la mode dans beaucoup de programme d’avoir des mouvements fonctionnels mais combien incorporent le squat ?).

Comme nous l’avons vu ensemble plus haut, l’articulation est faite pour être utilisée sur toute sa course : autrement elle peut être sensible à une usure prématurée. Pouvoir s’accroupir est donc un très bon test pour déterminer la santé des articulations du membre inférieur et s’assurer qu’elles bougent sans difficultés ! Être mobile est un indicateur de bonne condition physique : les personnes âgées le sont moins et perdent peu à peu en autonomie. Il faut donc rester vigilant à avoir une bonne mobilité et pouvoir la maintenir le plus tardivement possible !

Les haltérophiles et powerlifters montrent une stabilité plus importante du genou[3]. Plus une articulation est stable, plus le risque de blessure est réduit. Pour ces sportifs, le squat est un mouvement plus que déterminant pour la performance. Nous pouvons donc présumer que des années d’entraînement ont fait de leurs genoux, des articulations plus stables et plus fortes.

Les haltérophiles et powerlifters sont des athlètes aux genoux particulièrement solides.

Toutes personnes ayant déjà effectué une série lourde en squat sait à quel point c’est difficile. Vous les verrez en général souffrir de dyspnée (essoufflement) plus ou moins important. C’est un exercice, qui en plus d’être difficile pour les muscles des jambes et du tronc, sollicitant le système cardio-vasculaire de manière substantielle. C’est donc un bon moyen de travailler la santé du cœur[4] tout en luttant contre la sarcopénie (perte de muscle due au vieillissement) ou simplement tout en devenant plus fort ! Mais ce n’est pas le seul avantage de ce type d’entraînement !

En effet, l’entraînement de force augmente la densité osseuse et permet de prévenir l’ostéopénie ainsi que l’ostéoporose[5]. Le squat étant un pattern de mouvement important pour se lever et s’asseoir il doit faire partie intégrante des programmes de sport de tout âge et est particulièrement important pour les personnes âgées.

Comme tu peux le voir, le squat est un mouvement important pour la santé du corps mais c’est également un mouvement important pour la performance ! C’est d’ailleurs pour cette raison que les plus grands préparateurs physiques l’utilisent et ce n’est pas Charles Poliquin (préparateur ayant entraîné plus de 120 athlètes de classe mondiale dont la majorité ont participé aux JO) qui dirait le contraire !

D’ailleurs, une étude de Shanner AA et al. de 2014, publiée dans le Journal of Strength and Conditioning Research, a démontré que la réponse hormonale est plus importante pour des exercices à charge libre que pour leurs homonymes à charge guidée. Les taux sanguins de testostérone et d’hormone de croissance (deux hormones anabolisantes) étaient plus élevés après un exercice de squat qu’après un exercice de Leg Press[6]. Le squat est donc un exercice roi quand il s’agit de développer la masse musculaire ainsi que la force du bas du corps… Mais également pour le haut du corps ! Ces hormones n’étant pas secrétés localement, les muscles du corps entier profiteront d’un entraînement en squat !

Le squat est un exercice poly-articulaire : ce type de mouvement recrute beaucoup plus de groupes musculaires que les exercices d’isolation. Ces exercices favorisent le recrutement des fibres musculaires de type II : ces fibres sont celles qui sont principalement touchées par le phénomène d’hypertrophie. Le squat est donc plus efficace qu’un exercice de Leg Extension pour provoquer la croissance musculaire. De plus, la flexion complète améliore grandement l’activité musculaire des quadriceps et fessiers contrairement à sa variante partielle[7].

Le squat est sans pareil pour développer les cuisses (principalement le quadriceps) et les fessiers. Chaque personne souhaitant améliorer son apparence physique devrait l’incorporer dans son programme d’entraînement.

Une amplitude de mouvement plus grande va permettre un plus grand étirement des muscles impliqués. Cela va se traduire par une augmentation de la longueur des fibres musculaires ainsi que du diamètre de celle-ci tandis que les variantes partielles vont seulement induire une augmentation du diamètre des fibres[8]. Utiliser une amplitude de mouvement maximale permettra d’améliorer la compliance musculaire et ainsi prévenir des blessures potentielles.

La pénultième bonne raison de pratiquer le squat que j’ai retenue est que c’est un exercice très exigeant pour la totalité du corps. Le membre inférieur est sollicité mais également les muscles du core (abdominaux, lombaires, etc.) et du haut du dos (trapèzes). Il est rare, très rare même, qu’un athlète capable de squatter une charge considérable ait l’apparence d’un phasme. Effectuer un squat avec une charge conséquente est donc un très bon test de force générale et demande une musculature développée ! Les haltérophiles et dynamophiles en sont la preuve vivante !

The last but not least good reason to squat : il existe un nombre important de variantes qui vont s’adapter aux objectifs de chacun. Parmi ces variantes, certains exercices ont peu d’intérêt tandis que d’autres sont particulièrement intéressant. Je citerai le Front Squat, Overhead Squat, Hack Squat à la barre, Safety Bar Squat, Zercher Squat et le Low Bar Squat. Le premier permet de travailler la force du tronc et du core de manière plus importante grâce à la position de la barre qui est alors placée au niveau des clavicules ; et est également un peu plus exigeant pour les quadriceps. De plus, le pratiquer est directement transférable avec le mouvement d’haltérophilie d’épaulé-jeté. La seconde variante est également directement transférable avec l’haltérophilie et le mouvement d’arraché. C’est également un très bon exercice pour évaluer la mobilité du membre inférieur (surtout la mobilité de cheville) ainsi que la mobilité thoracique. Cette variante est particulièrement exigeante pour les épaules. Le hack squat à la barre est un exercice s’apparentant plus à un soulevé de terre qu’à un squat : la barre est placée derrière les mollets et il faut la soulever du sol. On préconise cette variante à ceux qui seraient blessés au niveau vertébral (notamment les tassements vertébraux) afin de répartir la charge de manière moins traumatisante. La Safety Bar Squat est une barre particulière qui déplace légèrement le centre de masse de façon à être plus exigeant pour les muscles du dos et fessiers tout en épargnant les épaules. C’est une variante particulièrement appréciée des Strongmen. Le Zercher est une variante intéressante pour cibler les trapèzes et rhomboïdes afin de les rendre plus fort et d’aider à garder le tronc bien droit lors de front squats et épaulés. Enfin, en ce qui concerne le Low Bar Squat, il recrute plus la chaîne postérieure (les ischios et fessiers) et permet de soulever des charges plus importantes que le squat olympique (High bar – performé par les haltérophiles olympiques) grâce à des bras de levier plus avantageux. Ici seule la position de la barre change : la barre n’est plus placée sur les trapèzes supérieurs mais plus bas, sur les deltoïdes postérieurs. Cela va avoir pour incidence d’être un peu plus contraignant pour les épaules et les coudes.

Nous nous retrouvons avec un paquet de bonnes raisons de pratiquer le squat ! Il est possible que d’autres te viennent à l’esprit mais je pense avoir fait un tour d’horizon relativement exhaustif. Je tiens cependant à nuancer quelques peu mes propos. Je parle à plusieurs moments des haltérophiles et powerlifters pour lesquels il est important de soulever des charges les plus lourdes possibles. Cela peut avoir des répercussions sur le corps (bien que ce ne soit pas le cas pour tout le monde) et il n’est clairement pas raisonnable de s’accroupir et de se relever avec plus de 200kg sur le dos. Tout le monde ne sait pas le faire et tout le monde ne devrait pas le faire ! Néanmoins pouvoir exécuter une série de squat sans charge peut attester d’une bonne condition physique et c’est pourquoi tout le monde devrait pouvoir le faire !

Quel usage pour le squat partiel alors ?

Il est courant d’observer que de nombreux athlètes de haut niveau ne pratique pas du tout de squat en amplitude complète et se limite à des variantes pour lesquelles l’amplitude est réduite. Tu peux comprendre que pour toutes les raisons évoquées plus haut, ce n’est pas une bonne idée : surtout en ce qui concerne la santé générale. Si du squat partiel est incorporé dans un programme d’entraînement, le squat en amplitude complète devrait également l’être ! Cependant, tous les athlètes ne devraient pas pratiquer la variante en amplitude réduite. Les sauteurs verticaux (basketteurs, volleyeurs, gardiens de football, etc.) sont parmi les seuls qui vont vraiment en tirer profit, bien que l’on ne puisse pas vraiment dire si c’est la flexion partiel ou complète qui offre la meilleure amélioration de la détente verticale[9]. D’après mon expérience personnelle, je ne dirais pas que le partiel seul est le plus efficace : le squat olympique permet de travailler la force et la vitesse et donc la puissance (qui est le produit de la force par la vitesse P=F*V, composante indispensable pour être un bon sauteur). Il n’est pas rare de voir des haltérophiles relativement légers effectuer des sauts verticaux impressionnants alors qu’ils ne pratiquent aucune variante à amplitude réduite. Par ailleurs, les méthodes de contraste comme l’entraînement bulgare et français ont démontré leur efficacité depuis de nombreuses années en ce qui concerne l’amélioration des capacités de saut vertical[10]. Le principe des méthodes consiste à enchaîner un exercice dit lourd (avec charge faut-il entendre) suivi d’un autre exercice exécuté à vitesse maximale. Pour que cela soit efficace, il convient que les deux exercices aient une exécution semblable à celle du mouvement que l’on souhaite améliorer. Si tu souhaites améliorer ta détente, une partie de ton entraînement pourrait se présenter comme telle : Squats (partiels ou complets, vu que l’un ne semble pas être meilleur que l’autre) 3 à 5 répétitions à 80% de ton 1RM (la charge maximale que tu es capable de soulever 1 fois sur cet exercice) immédiatement suivis de 4 sauts de haies pieds joints. Tu répéterais cet enchaînement à plusieurs reprises lors de la séances.

Les haltérophiles ont une détente verticale impressionnantes malgré l’absence de squat partiel dans leur entraînement.

D’autres athlètes qui bénéficient de l’utilisation du squat partiel sont les powerlifters et strongmen[11]. Ils agenceront même l’exécution de l’exercice en ajoutant une box sur laquelle s’asseoir (ou pour se donner un repère à partir duquel remonter et travailler juste en dessous de la parallèle). Le fait de s’asseoir sur la box, placée idéalement à 2-3cm au-dessus de la parallèle, va leur permettre de prendre plus lourd que sur un squat complet. À terme cela habituera leur système nerveux à soulever plus lourd et renforcera les muscles impliqués dans le mouvement. De plus cela permet de travailler sur la portion la plus difficile du mouvement en se forçant à créer de la vitesse.

En ce qui concerne le squat en amplitude réduite, ce sont les seules raisons valables qui me viennent à l’esprit quant à son utilisation dans une optique de performance. Tu as bien compris plus haut que pour la longévité de ton genou, ce n’est pas le meilleur exercice, incorpore donc également des flexion complète (même si ce n’est qu’avec ton poids de corps). Néanmoins, dans la vie quotidienne, tu te rendras vite compte, que peu de situations requièrent un accroupissement. La plupart du temps, il te suffira d’être capable de t’asseoir sur un siège : l’amplitude fonctionnelle d’un squat pour M. et Mme Tout le monde sera donc partielle. Le full squat n’est donc pas  »très » fonctionnel, pourtant, cela reste un mouvement diablement efficace pour travailler la condition physique et juger de celle-ci. C’est pourquoi, il supplante largement sa variante à amplitude réduite selon moi et même si cette dernière est plus fonctionnelle…

Amplitude fonctionnelle du squat.

Quelques considérations

  • Avant de vouloir s’accroupir avec une charge importante (ou non), assure-toi que ta technique sans charge soit déjà bonne.
  • Il n’est pas impossible que dans un premier temps tu sois incapable de réaliser un squat complet correct suite à des restrictions de mobilité, passes simplement du temps à travailler la mobilité de cheville et de hanche, voire même de l’épaule.
  • L’idéal serait qu’un coach ou entraîneur COMPETENT puisse te coacher afin de s’assurer que ta technique est correcte.
  • La technique prime sur la charge et non l’inverse ! Laisse ton égo au placard sinon tu vas finir en corbillard !
  • Un squat efficace est un squat performé avec un bon bracing ! N’hésite pas à te renseigner là-dessus (https://smartandstrong270241888.wordpress.com/2018/05/20/pourquoi-le-bracing-et-le-port-dune-ceinture-lombaire-lors-de-manipulation-de-charges-sont-ils-importants/ ).
  • Squatter lourd demande du temps et de l’expérience, n’essaye pas de brûler les étapes et sois patient(e) !
  • Si quelqu’un te dit que squatter sous la parallèle est mauvais, surtout si c’est ton kiné, commence par lui montrer ceci et s’il ne change pas d’avis, fuis !
  • Tout ce que tu as pu lire s’applique à un sujet ne souffrant d’aucune pathologie particulière et si ce n’est pas le cas, discute avec ton thérapeute afin d’établir une stratégie de traitement et de retour au sport te permettant d’inclure le squat.

Tu l’auras bien compris, je ne pense pas qu’il existe des mouvements que l’on devrait à tout prix éviter, juste des mouvements à prioritiser face à d’autres en fonction du contexte et de l’objectif à atteindre ! Si tu souhaites passer maître dans l’art du dunk, squatter en amplitude partielle sera bien plus spécifique au geste que tu devras accomplir afin d’y arriver mais si tu souhaites squatter 200kg, il te faudra impérativement effectuer le mouvement en amplitude complète ! Ensuite, nous devrions utiliser le mouvement comme un moyen de rester en bonne santé et non pas seulement comme un outil au service de la performance. Ne soyons pas kinésiophobes : le corps est robuste et fait pour bouger ! Et comme le dit Greg Everett : chaque jour où tu ne squat pas est un jour qui te rapproche du jour où tu n’en seras plus capable !

Pour clôturer cette lecture, voici quelques citations (en anglais) à propos des squats par le Aaron Horschig, docteur en physiothérapie, auteur de The Squat Bible et fondateur de ‘’Squat University’’ :

  • Heavy Squats won’t lead to knee replacements… Never touching a barbell and sitting in a chair 8+ hours a day sure will though !
  • Squatting deep isn’t bad for your knees, not having the ability to squat deep is !
  • Modern medicine may add days to your life, but heavy squats will add life to your days !
  • If you want to grow older without back pain, a blown Achilles or a total knee replacement – learn to sit in a deep bodyweight squat EVERYDAY.

Ressources :
-The Poliquin Principles de Charles Poliquin
-Strength & Conditioning Research , https://www.strengthandconditioningresearch.com/
-The Squat Bible de Aaron Horschig
-Starting Strength de Mark Rippetoe

https://pdfs.semanticscholar.org/f6ec/81a44eb19ce3ab7636d09007171b45c54049.pdf

Thibault B.


[1] http://www.exercisebiology.com/index.php/site/articles/are_deep_squats_bad_for_your_knees

[2] https://shruggedcollective.com/wp-content/uploads/2015/04/DeepSquat-Review-Barbell-Daily-3-27-15.pdf

[3] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/2733579

[4] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30376511

[5] https://journals.lww.com/nsca-jscr/Fulltext/2013/10000/Maximal_Strength_Training_in_Postmenopausal_Women.32.aspx

[6] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/m/pubmed/24276305/?fbclid=IwAR1DV59gRV5cPDuVoICDKzlZHMamPJSz-iop7TfmqzITuirVwLNfujJAAJs

[7] http://www.maloneyperformance.com/Blog/?p=1306

[8] https://medium.com/@SandCResearch/does-a-full-range-of-motion-always-produce-more-muscle-growth-5bf7fc6e4b55

[9] https://medium.com/@SandCResearch/how-do-strength-gains-transfer-to-vertical-jumping-b7c6a962ab84

[10] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/?term=partial+squats+and+jumping

[11] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24662234

3 Replies to “Les Squats en amplitude complète sont-ils réellement mauvais pour nos genoux ?”

  1. Je ne vais pas donner mon avis mais le « monde » de l’haltérophilie belge le connaît. J’ai bientôt 62 ans. Je fais du sport de compétition depuis l’âge de 14 ans. J’ai squatté en amplitude complète de 17 à 36 ans ensuite 10 ans à courir jusqu’au marathon puis retour à l’haltérophilie et au powerlifting jusqu’à maintenant et plus. A l’heure actuelle toujours pas de problèmes de genoux et de hanches… Je dis ça, je dis rien ou en fait je dis tout! 😉

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